petit… petit… petit… viens par ici ! [Maïlis]

Maïlis sentit la moiteur du sang sur ses mains nus et sur son visage d’opaline. Elle déglutit doucement en découvrant que ses vêtements étaient humides et empestait d’une odeur de fer. Elle passa sa main tremblante dans ses cheveux collés par le fluide vital de l’animal décédé et décrocha une plume rouge de sa tignasse.

Son visage était un masque d’impassibilité à ce moment précis mais on pouvait deviner qu’elle palissait à vue d’œil. Elle déglutit difficilement, relâcha la plume qui tomba mollement sur le sol avant que ses yeux ne s’écarquillent.

Elle fit volte-face et se précipita hors de la volière. La porte claqua violemment contre la paroi de pierres et elle dévala les escaliers comme une folle furieuse, manquant de tomber à chacun de ces pas. Une fois en pas, elle tomba à genou sur le sol rugueux, ne ménageant nullement ses genoux et les paumes de ses mains. Ses cheveux se collèrent sur son visage et elle se mit à vomir dans le fourré tout proche.

Maïlis changeait de couleur mais pas un son ne sortit de sa bouche. Je me serais attendu à des petits cris suraigus, mais elle n’était pas ce genre de fille. La seule réaction active qu’elle eut fut de sortir en trombe de la volière, me laissant seul, planté là devant la carcasse de l’animal.

« Ouais, c’est ptet pas plus mal »

Laissai-je échapper. Faisant fi de l’odeur qui maintenant m’empestait, j’allai chercher dans mon cartable un sac assez grand pour y fourrer les restes du hibou. Je crois que j’avais décidé que plus jamais je ne tenterais une expérience sans un minimum de précaution, ça dérapait d’une manière catastrophique sans préparation.

Mon cartable sur l’épaule, et le sac dans une main je sortis de la volière, l’air déterminé. Mon allure n’était pas très belle à voir, il ne faudrait pas que je croise qui que ce soit avant de m’être débarrassé du sang et des plumes. J’irais au lac, il ne devrait y avoir personne.

Je découvris Maïlis un peu plus loin ; à genou. Son estomac n’avait pas supporté la dernière épreuve. J’hésitai quelques secondes avant de me décider de m’occuper en tout premier lieu de me débarrasser de l’animal. Et si jamais, à mon retour Maïlis était encore là, je tenterai de la traîner jusqu’au lac pour la débarbouiller.

Maïlis ne sursauta même pas à l’approche de James, à vrai dire, sa voix avait eu toutes les peines du monde à parvenir à elle. Son cerveau était comme déconnecté de la réalité et tout autour d’elle lui paraissait abstrait voir inexistant.

Se redressant légèrement, essayant le coin de sa bouche avec le peu de cape propre qu’il lui restait, Maïlis fixa la flaque de bile qui jonchait le sol, aux racines des arbustes. La question de James résonna étrangement dans son crâne et elle tourna les yeux vers lui.

Son visage était plus blême qu’à la normal, ses cheveux étaient collés par une substance rouge, épaisse et visqueuse et des traces de ce même liquide opaque avait coulé sur ses joues avant de coaguler. La vision aurait pu laisser croire que la jeune fille était passée à tabac.

Elle fixa James sans réaction aucune, ni dégoût, ni colère, ni joie, ni peine… Rien… Son regard était vide de sens. Elle le fixa sans ciller avant que des larmes viennent se mélanger au trace de sang sur ses joues sans un sanglot, sans un mot… comme si elle apparaissait spontanément dans un silence de mort.